Le gouvernement prolonge les indemnisations pour le travail de nuit et les gardes


La majoration des indemnité horaires pour le travail de nuit et l’indemnisation des gardes pour les praticiens exerçant dans un établissement public de santé ont été prolongées jusqu’au 31 août suite l’arrêté du 29 mars 2023.


Ces mesures avaient déjà été prolongées de fin septembre 2022 jusqu’à fin mars 2023.

François Braun, Ministre de la Santé et de la Prévention, a expliqué que cette prolongation a pour but de « reconnaître les sujétions particulières attachées au travail de nuit et à faire face aux difficultés et aux tensions anticipées sur l’offre de soins dans les prochaines semaines et les prochains mois ».

Cette prolongation concrétise les annonces faites par le Président Emmanuel Macron en janvier dernier. Il avait confirmé le maintien des mesures d’urgence jusqu’à ce que le chantier sur la rémunération du travail de nuit et la permanence des soins en établissement de santé soit achevé.

Les taux des indemnités horaires pour travail normal de nuit et de la majoration pour travail intensif sont fixés comme suit :

  • 0,34 euros pour le travail normal de nuit pour les fonctionnaires titulaires et stagiaires
  • 1,80 euros pour le taux de majoration pour travail intensif
  • 2,52 euros pour le taux de majoration pour travail intensif pour les personnels affectés dans une structure de médecine d’urgence, une unité de soins intensifs, une unité de surveillance continue ou un service de réanimation, dont l’organisation du temps de travail alterne des horaires de jour et des horaires de nuit.
Conseil de l’APPA : Votre hôpital applique-t-il ces majorations ? Pensez à contrôlez vos fiches de paie.

Interview de Marie Pezé psychanalyste et docteur en psychologie


Psychologue et psychanalyste renommée, Marie Pezé est aussi une militante farouche contre la souffrance au travail, dont elle dresse un constat aussi implacable que les solutions médico-juridiques proposées par son association et son réseau de consultations dédiées…


Quel est votre parcours?

Je suis psychologue clinicienne et psychanalyste de formation. J’ai exercé pendant 30 ans à l’hôpital de Nanterre où a été créée la chirurgie de la main. On y recevait des accidentés du travail et j’ai fait ma thèse sur l’approche psychosomatique de ces lésions. Au fil des années, nous avons organisé des consultations pluridisciplinaires avec le chirurgien et nous avons vu arriver des populations de plus en plus différentes. A l’époque, pour les médecins, les canaux carpiens des caissières ne pouvaient que relever de problèmes d’hormones, car on ignorait complètement ce qui se passait dans le monde du travail, tout comme les troubles musculo-squelettiques (TMS). J’avais commencé à travailler avec Dr. François Boureau, créateur de le première consultation anti-douleur à l’hôpital Saint-Antoine, sur les douleurs neuropathiques, car on commençait à recevoir des patients qui présentaient ces symptômes. Mais il n’y avait pas d’IRM, donc on ne pouvait pas voir les lésions nerveuses, ce qui incitaient les médecins à penser que c’était psy…. Autrement dit : « Marie, tu t’en occupes » ! Les patients me parlaient de leurs douleurs comme des décharges électriques ou des coups de poignards. Ils me racontaient tous la même chose, donc je me suis dit que ça ne pouvait pas être seulement dans la tête… Avec le Dr. François Boureau, nous nous sommes ainsi lancés dans des études cliniques concernant les douleurs des membres supérieurs, traitées par antiépileptiques, puis les TMS. C’est à partir de ces résultats qu’on a compris que ces pathologies étaient le produit d’une intensification du travail avec des cadences irréalistes pour la physiologie humaine. Nous étions initialement face à des métiers très féminisés (caissières, femmes de ménage), ce qui nous a permis de réfléchir, en parallèle, sur la question de la division sexuelle du travail. Puis les cadres de La Défense sont arrivés, à partir des années quatre-vingt-dix, reflétant l’évolution des modes de travail (augmentation des objectifs, séparation des collectifs, éloignement des services ressources, etc) et leurs conséquences immédiates sur les risques de souffrance. Tout cela était parfaitement décrit dans un guide écrit par un psycho-physiologiste américain, Dr. Peter Kruse, qui faisait du counseling en entreprise. Avec l’accord de ma direction, à l’hôpital, j’ai commencé à collaborer avec le Pr. Christophe Desjours, qui travaillait à l’Institut psychosomatique, puis j’ai ouvert la première consultation « Souffrance et Travail » en 1995. En 1998, suite à la parution du livre de Dr. Marie-France Hirigoyen sur le harcèlement moral, on a vu arriver ce sujet dans les consultations. Au-delà de leur cas personnel, je m’apercevais que les patients ne faisaient rien non plus pour dénoncer les situations analogues affectant leurs collègues ; c’était encore le règne du » benchmark », de la mise en concurrence entre les salariés, de la destruction de la solidarité, du collectif de travail et, en définitive, d’une très grande solitude pour chacun. Nous étions vraiment face à une pathologie de la solitude.… Ensuite, en 2002, la loi sur l’obligation de protection de la santé physique et mentale des salariés a été renforcée.  Nous nous sommes revus avec Christophe [Desjours] pour créer un certificat, en 2008, afin de former des professionnels du sujet, car il faut des connaissances pointues notamment sur le plan juridique. » J’ai lancé en 2011 le site Souffrance et Travail, l’annuaire des consultations, la base de ressources avec l’association DCTH (Diffusion des Connaissances sur le Travail Humain). Aujourd’hui, on référence plus de 200 consultations en France, en Europe et même au Japon. Elles sont labellisées à partir de critères de formation, qui nécessitent à minima un diplôme d’État (clinicien, psychiatre, psychologue) et l’obtention du module de mise à jour médico-juridique. Il faut ces deux certifications pour entrer dans le réseau.

Vous évoquez l’étranger… On constate les mêmes problématiques ?

Tout à fait. Les tableaux cliniques sont identiques partout, quels que soient les pays, des États-Unis à la Suède, car le travail dans la santé est globalement dégradé. Il faut se souvenir que le concept de burn-out a été inventé dans la communauté médicale : c’était d’abord un syndrome de soignant, même si les phénomènes d’épuisement professionnel existent aujourd’hui dans tous les métiers. En France, la logique de la tarification à l’activité (T2A) n’est pas différente de ce qu’on voit partout ailleurs avec la financiarisation du soin et la « grammaire chiffrée » qui déshumanise le travail et surcharge les professionnels de procédures, de reportings, de tableaux Excel à remplir, etc.

Il y a davantage de souffrance ou on en parle davantage ?

Tous les 6 ans, en France, il y a une grande étude épidémiologique, intitulée SUMER, qui est tellement référente et prédictive sur le plan statistique qu’elle est primée à chaque édition. La dernière enquête a été publiée en 2019. On sait que 37% des travailleurs français seraient en souffrance au travail et que la fonction publique hospitalière est 4 fois plus exposée aux risques que les autres secteurs. Près de la moitié des salariés français (47 %) déclare souffrir de conflits « éthiques », liés à la mauvaise qualité du travail qu’ils ont le sentiment de produire et qui a des conséquences négatives sur leur santé mentale et physique. Il y a beaucoup d’autres données extrêmement précises que vous pouvez trouver sur le site de la DARES ou auprès des inspecteurs du travail de l’association. Tous convergent vers une même réalité : depuis 20 ans, tout s’aggrave… On en parle davantage certes, mais cela n’empêche pas de pérenniser les mêmes systèmes organisationnels qui sont les principaux facteurs de déshumanisation du travail

Il y a quand même des tentatives de solutions, non ?

En réalité, on a beaucoup lâché sur la santé pour aller sur « Qualité de Vie au Travail (QVT) », un pur concept américain, hérité d’un pays qui ne connaît même pas la médecine du travail ! Donc, oui, on va mettre des babyfoots dans des salles amiantées, mais ce n’est pas cela la protection de la santé au travail ! Au salon Préventica, où l’association a un stand, on voit plein de fauteuils relaxants, de lunettes de réalité virtuelle ou de concepts d’escape game pour apprendre à marcher sur un toit, quand on est couvreur, grâce à des carreaux qui s’allument… Mais ce n’est pas cela non plus, la sécurité au travail ! Il n’y a plus de référentiel de base qui protège les salariés sur ces sujets. Une étude récente vient de montrer qu’on est dernier en Europe pour les conditions de travail, avec des chiffres calamiteux, comme si le chef d’entreprise français n’en avait rien à faire de la prévention primaire ! On a un très bon système de prévention tertiaire, on sait soigner les gens, mais on ne sait pas empêcher le risque d’advenir… Et d’ailleurs, on a un taux record d’accidents du travail, des conditions de travail dégradées et de très mauvais résultats en matière de burn-out, en particulier chez les femmes. En France, on met beaucoup en avant le taux de présentéisme, par rapport à d’autres pays, mais qu’est-ce que cela veut dire en réalité ? Montrer qu’on est « corporate » alors que celui qui reste tard, dans d’autres pays, est perçu comme mauvais ! En Suède, certains chefs d’entreprise font passer l’échelle Karolinska du stress à leurs salariés et, quand les résultats sont mauvais, ils sont automatiquement pris en charge. Chez nous, on parle de « safespace », en utilisant toujours des intitulés anglo-saxons, alors qu’on a la meilleure école d’ergonomie au monde, des cliniciens très réputés et le 4ème taux de productivité du travail à l’échelle internationale ! Le débat actuel sur les retraites est en réalité celui sur les mauvaises conditions de travail. J’ai fait toutes les commissions parlementaires depuis 25 ans, le sujet revient à chaque fois mais il s’efface aussi vite… Je suis un peu fataliste car, même s’il y a quelques raisons d’espérer, j’ai la conviction que les organisations du travail ont gagné la bataille. La procédurisation numérique a accéléré la victoire avec des outils qu’on a nous-mêmes fabriqués et qui nous kidnappent aujourd’hui…

Quelles sont ces raisons d’espérer ?

Le seul espoir, c’est qu’il y a des gens qui inventent des lieux de réparation, dans lesquels on a le temps de penser. Si vous redonnez le temps de penser, alors les gens développent des mécanismes de défense, ils font plus attention à leurs corps, ils vont mieux se protéger, ils vont faire appel plus fréquemment à la loi. Ce qui est vertueux, c’est de transformer les gens qui travaillent en citoyens avertis de leurs droits. A l’instar de ce qui avance sur le plan de l’environnement, je crois encore aux réflexes citoyens à l’échelle locale. Des ressources existent et elles sont sur les territoires…

De façon générale, la prise en charge des risques psycho-sociaux demande une ingénierie complète, médico-sociale, administrative, juridique et parfois judiciaire. C’est complexe, rébarbatif et très protocolaire, mais elle permet aussi de tirer les gens d’affaire, afin de les soigner tout en les sécurisant sur le plan financier. Nous sommes également dans une construction de l’ignorance qui concerne tous les travailleurs, notamment les praticiens hospitaliers. Je suis certaine, par exemple, que les médecins de la fonction publique ne savent pas qu’ils peuvent mobiliser, depuis l’année dernière, les tableaux de maladie professionnelle du privé. De même, ils ignorent sûrement que l’ordonnance de 2019 inverse la charge de la preuve, ce qui change beaucoup de choses : c’est désormais à l’administration de prouver que tel ou tel problème n’est pas un accident de service, et non plus à la personne qui en est victime de démontrer que c’en est un. Je ne peux pas nier qu’il y ait eu des améliorations sur le sujet, mais elles ne redescendent pas toujours, ce qui enlève aussi beaucoup de possibilités de réaction…

Vous proposez aussi des outils, notamment sur votre site Internet…

Oui et c’est l’objectif fondateur de l’association : diffuser des connaissances sur le travail humain. On met en ligne, en temps réel, des jurisprudences, des ressources et des outils, comme des modèles de courriers pour s’adresser à sa direction ou contester par exemple un refus de la caisse des accidents du travail. Le site propose également un test de propagation du burn-out avec différentes déclinaisons par métiers, notamment pour les soignants. On y trouve aussi des guides pratiques, des webinaires avec Préventica, des contacts utiles pour accéder aux consultations ou aux dispositifs de médiation. Le site est vraiment le reflet de notre approche médico-juridique, afin que les visiteurs puissent connaître les moyens de prise de charge mais aussi se défendre. Il est à l’image de notre groupe de travail pluridisciplinaire (juristes, inspecteurs, psychologues, psychiatres, etc.) que je réunis tous les mois et demi. On discute des ressources, des actions à mettre en œuvre et, lorsque nous sommes sollicités pour un problème concret de santé, on créé un réseau de soin autour de la personne concernée. L’association peut l’orienter vers un bilan neuro-psychologique ou une consultation juridique, pas forcément pour porter plainte mais pour qu’elle soit déjà informé sur ses droits. On se renseigne également sur la prévoyance si elle n’est pas arrêtée, en privilégiant si possible le Congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS) à l’hôpital, car il n’y a pas de durée limite contrairement à l’arrêt longue durée. Même si, derrière, le diagnostic va être une dépression ou un épisode de burn-out, il faut parfois utiliser les ruses des médecins conseils pour faire arrêter les personnes dès les premières crises de larmes, de nerfs ou d’hypertension… Nous travaillons également avec des établissements de santé dans lesquels l’association propose des conférences, des formations et même un serious game sur le harcèlement moral élaboré avec une start-up, Work and Play. Nous proposons ce type d’outils aux directions, tout en accompagnant en parallèle les PH qui se font « massacrer » et vont parfois très très mal…

www.souffrance-et-travail.com

Charge psychologique et hospitalo-universitaires en France


L’APPA a la volonté d’aider chaque praticien confronté aux risques psychosociaux dans le cadre de son exercice professionnel et souhaite développer des outils de sensibilisation et d’accompagnement.


Nous avons été très intéressés par un article récent du JAMA accessible en open source (JAMA Network Open, publication en ligne du 30 mars 2023) car traitant de ce sujet particulièrement sensible.

Cette publication, intitulée : “Job Strain, Burnout, and Suicidal Ideation in Tenured University Hospital Faculty Staff in France in 2021”, a été portée par une équipe de chercheurs français à la suite d’une étude nationale menée avec la Société de Réanimation de Langue Française (SRLF).

Son objectif était d’examiner la prévalence et les déterminants des symptômes de burnout sévère, le stress au travail et les idées suicidaires chez les professeurs et professeurs associés titulaires des CHU.

Une enquête en ligne a été soumise à 5 332 d’entre eux entre octobre et décembre 2021 et ils ont été 2 390 à répondre (taux de réponse de 45 %), âgés en moyenne de respectivement 53 et 40 ans, avec respectivement 78 % et 50 % d’hommes.

L’enquête comportait des questions dans sept domaines : les caractéristiques personnelles et l’expérience professionnelle, l’organisation du temps de travail en y incluant le temps auprès des patients, la recherche, l’enseignement et les tâches administratives, les symptômes liés au stress professionnel, l’avancements de carrière et les perspectives, les symptômes de burn-out et ressentis personnels.

Les professeurs et professeurs associés déclaraient travailler respectivement 65 et 60 heures par semaine dans l’établissement, deux à trois week-ends par mois et deux nuits par mois pour les professeurs associés uniquement.

Globalement, les activités les plus chronophages étaient les soins aux patients (40 %) et la recherche et l’enseignement (30 %) mais les tâches administratives représentaient tout de même 20 % du temps de travail (10 % pour les activités transversales).

Les soins aux patients étaient l’activité présentant le score de satisfaction le plus élevé (70 points sur 100), suivis par l’enseignement (60 points) et la recherche (50 points) alors que les tâches administratives ne récoltaient que 20 points.

Aux Etats-Unis, des travaux ont rapporté un burn-out chez un tiers des médecins ainsi qu’un risque accru de suicide et de dépression chez les titulaires de grands centres académiques.

En conclusion, 40 % des répondants présentaient des symptômes de burn-out sévères, ils étaient 12 % à rapporter des symptômes de stress professionnel et 15 % à avoir des idées suicidaires.

La moitié présentait au moins une de ces trois caractéristiques

Les facteurs de risques de burn out significatifs étaient de ne pas avoir d’activité clinique, de ressentir que le travail empiète sur la vie privée, de se sentir obligé de constamment faire face, d’envisager un changement de carrière et d’avoir vécu un harcèlement.

L’item « idées suicidaires » était associé aux faits d’être atteint d’une maladie chronique, d’avoir été victime de harcèlement ou ne pas se sentir capable de discuter de ses difficultés professionnelles avec un collègue.

Cette recherche souligne pour ses auteurs, l’urgence de développer des mesures pour améliorer les conditions de travail dans les CHU et augmenter leur attractivité pour les futures générations.

Source :  JAMA Network Open, publication en ligne du 30 mars 2023)

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INTERVIEW DE LISA SANCHIS AUTEURE DE LA BANDE DESSINÉE « LA ROUTE DU BLOC »


Dans sa première BD, La route du bloc – une vocation à l’épreuve du réel, Lisa Sanchis rend hommage à la vocation de son conjoint, chirurgien pédiatrique, tout en racontant les ressorts de son burn-out et de la souffrance à l’hôpital.


Lisa Sanchis, La route du bloc – une vocation à l’épreuve du réel, Éditions Delcourt, 2022

Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?

J’ai fait une école d’arts appliqués en graphisme et en direction artistique. Par la suite, j’ai travaillé essentiellement dans l’édition sur des projets de livres d’éveil destinés aux enfants puis, en tant que graphiste, chez un éditeur BD. Je me suis toujours intéressée à la bande dessinée, en gravitant autour, mais sans pour autant me lancer dans l’exercice. C’est au contact de mon conjoint chirurgien, en écoutant son histoire, que je me suis dit qu’il fallait la raconter et que la BD était le support pertinent étant donné que j’ai quelques compétences en dessin. 

Quel est le récit de La Route du Bloc, en quelques mots ?

La BD raconte le parcours d’un soignant, de sa vocation dès la petite enfance à devenir chirurgien jusqu’à l’exercice de son métier et son épisode de burn out. La narration représente toutes les étapes qu’il a connu pour réaliser son rêve mais aussi, en toile de fond, la situation de l’hôpital public. Je ne voulais pas seulement raconter la vie de mon conjoint, mais plutôt créer un personnage auquel tout le monde puisse s’identifier. Que la lectrice ou le lecteur, médecin ou non, puisse ainsi se mettre à la place d’un chirurgien pédiatrique, saisir ce rêve d’enfance, comprendre les satisfactions du quotidien comme les difficultés.

« La narration représente toutes les étapes que mon mari chirurgien a connu pour réaliser son rêve mais aussi, en toile de fond, la situation de l’hôpital public. »

Au-delà de l’idée, y a-t-il eu moment déclencheur qui vous a incité à vous lancer ?

Oui, le livre débute justement par cet événement déclencheur, lorsque mon conjoint en situation d’épuisement professionnel, s’était effondré au milieu d’un restaurant lors d’un voyage en Islande.  Je m’étais instantanément dit que cette situation n’était pas normale et qu’il fallait la raconter. Le projet en lui-même a pris à peu près 4 ans entre l’idée initiale et la parution du livre. Durant la première année, je l’ai interrogé pour qu’il me raconte son histoire en détail, en prenant des notes ou en l’enregistrant. Puis j’ai pris le temps de tout retranscrire, découper ses histoires, construire un récit pour en faire une BD.

© Éditions Delcourt, 2022 — Sanchis

Quel message avez-vous voulu faire passer en racontant le parcours de Benjamin, votre personnage principal ?

L’idée de base était vraiment de rendre hommage au personnel qui fait vivre l’hôpital public. Mon personnage principal est directement inspiré de mon conjoint, mais j’avais aussi envie de parler de l’ensemble du corps médical. Ce sont des personnes qui ont pour vocation d’aller vers les autres et qui le font, au final, dans des conditions très difficiles, qui peuvent même briser des vies, comme on peut le voir avec les nombreux suicides parmi des internes ou d’autres problématiques du genre. La santé mentale des soignants est un sujet qui me préoccupe. Cela étant, je ne voulais pas faire quelque chose de « plaintif », car j’avais aussi en tête de révéler, en images et dans le texte, la beauté du métier et de ces engagements. C’est ce que j’ai essayé de faire en racontant par exemple les opérations, de façon très détaillée, car l’activité au bloc est aussi très passionnante et stimulante intellectuellement.

Pourquoi être remontée aussi loin dans l’histoire de Benjamin pour expliquer les ressorts de son burn-out ?

Quand j’ai rencontré mon conjoint et qu’il m’a raconté qu’il voulait être chirurgien depuis l’âge de 3 ans, j’ai trouvé cela fascinant et pas banal. En burn-out à l’âge de 30 ans, j’ai réalisé, sans doute avec colère, ce que cette vocation précoce lui avait coûté.  Les études de médecine, l’apprentissage et l’exercice de la chirurgie impliquent de faire beaucoup de sacrifices, parfois jusqu’à sa propre santé. C’était vraiment important pour moi de partir de son enfance, raconter la naissance de cette vocation, combien elle lui était chevillée au corps, pour mettre ensuite en lumière toutes les problématiques auxquels il a été confronté.

En quoi le format BD peut-il être pertinent pour raconter l’hôpital et ses difficultés actuelles ?

Comme je vous l’expliquais, je viens de l’édition jeunesse et j’ai assez logiquement vu l’intérêt de l’illustration pour décrire les décors, les interactions et les schémas des opérations. La bande dessinée, qui est accessible à tous les publics, est un bon support pour exprimer des contenus parfois complexes ou un peu abstraits, comme ce qui a trait à la santé mentale. Je me suis toujours dit que le premier lecteur, c’était moi, or je ne viens pas du tout du milieu médical ! Quand j’interroge mon conjoint et que je retranscris, en récit, ce qu’il m’explique, il faut que ce soit limpide pour tous. Que tout le monde comprenne comme moi je le comprends. La BD est intéressante de ce point de vue car elle permet d’être à la fois didactique et dans l’émotion.

ADAPTATION DE LA LOI AU DROIT EUROPÉEN


La loi n°2023-171 a été publiée le 10 mars 2023 au Journal Officiel pour adapter les dispositions au droit de l’Union européenne, en particulier celles issues du domaine de la santé. Cette loi comprend 39 articles, dont une dizaine qui traitent de la santé que vous retrouverez ci-dessous.


L’article 21 applique aux agents publics la directive (UE) 2019/1152 pour des conditions de travail transparentes et prévisibles. L’article 22 étend ce droit aux praticiens hospitaliers titulaires et contractuels des établissements publics de santé et des EHPAD publics.

L’article 23 permet de retirer à un établissement son autorisation de pratiquer des actes de chirurgie esthétique en cas de « communication commerciale directe ou indirecte, déloyale, portant atteinte à la santé publique » mais aussi « qui, par son caractère, sa présentation ou son objet, est susceptible d’inciter les mineurs » à recourir à ses prestations.

L’article 24 adapte le code de la santé publique aux exigences européennes concernant la composition et l’information Applicables aux aliments Diététiques Destinés à des Fins Médicales Spéciales (ADDFMS) et aux Denrées Alimentaires Destinées à des Fins Médicales Spéciales (DADFMS).

Les pharmacies, les prestataires de services et les distributeurs autorisés seront les seuls à pouvoir les délivrer et les DADFMS répondant à des besoins nutritionnels particuliers pourront être soumis à une prescription obligatoire. La loi prévoit une période de deux ans pour permettre une mise en place concertée des nouveaux circuits de distribution.

L’article 25 adapte le code de la santé publique et le code du travail aux dispositions communautaires sur la classification, l’étiquetage et l’emballage des substances et des mélanges.

L’article 27 ratifie des ordonnances sur l’adaptation dans le droit français concernant les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, et intègre des dispositions pour lutter contre les ruptures d’approvisionnement.

L’article 28 permet d’infliger des pénalités financières aux pharmacies d’officine qui n’utilisent pas le répertoire national de vérification des médicaments permettant d’assurer la sérialisation des produits et de détecter les médicaments falsifiés.

L’article 29 prévoit la suppression des exemptions dont bénéficie le tabac à chauffer, notamment en interdisant les arômes caractéristiques pour ces produits et en imposant des avertissements sanitaires similaires à ceux des cigarettes et du tabac à rouler.

L’article 15 modifie le code de la commande publique pour permettre à un opérateur économique ayant une condamnation définitive de ne pas être exclu des marchés publics s’il fournit des preuves de mesures suffisantes pour remédier aux infractions pénales.

En conclusion, cette loi comporte plusieurs articles visant à harmoniser le cadre juridique français avec les exigences européennes. Ces dispositions touchent différents domaines de la santé, tels que la régulation de la distribution des aliments diététiques destinés à des fins médicales spéciales, la classification et l’étiquetage des substances et des mélanges, la réglementation des dispositifs médicaux et la lutte contre les ruptures d’approvisionnement, la sérialisation des médicaments (…) ainsi que l’amélioration des conditions de travail des agents publics et des praticiens hospitaliers. Ces mesures sont destinées à renforcer la protection de la santé publique en France et à assurer une meilleure coordination entre les différents acteurs impliqués dans le système de santé.

UNE ÉTUDE SERA MENÉE SUR LA SANTÉ DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ


« Prendre soin de ceux qui nous soignent est un devoir. Un devoir auquel nous devons répondre ensemble. »
Agnès Firmin-Le Bodo


Les dernières crises sanitaires ont mis en lumière les différents risques sanitaires auxquels sont exposés les professionnels de santé. Ces risques, qui sont ancrés dans un « système de santé dégradé » ne sont pas près de disparaître. Ainsi, la ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé, Agnès Firmin-Le Bodo a annoncé le lancement de travaux de recherche pour documenter les risques sanitaires, physiques et psychosociaux auxquels sont exposés les professionnels de la santé. Ces travaux permettront de « documenter de façon robuste notre connaissance et coconstruire avec les professionnels de santé des mesures qui apporteront des réponses à leurs besoins en santé »

L’attractivité des métiers de la santé a également été discutée, avec une préoccupation particulière portée sur les étudiants et les femmes professionnelles de santé, qui sont identifiées comme étant à haut risque.

Un sondage national pour recueillir l’opinion des professionnels de la santé

« Les solliciter directement pour montrer à chacun que l’on souhaite apporter des réponses » Agnès Firmin-Le Bodo

Le cabinet de la ministre souhaite centraliser les données de ces travaux. Agnès Firmin-Le Bodo indique que « la première priorité est de préciser finement les problématiques de santé auxquelles sont exposés les soignants pour quantifier les phénomènes à l’œuvre et cela passe par un engagement dans le développement de la recherche« .

Dans cette perspective, une enquête nationale a été lancée le 31 mars, en collaboration avec les fédérations hospitalière de France, de l’hospitalisation privée, des établissements hospitaliers, Unicancer, le Groupe SOS, la Croix-Rouge et autres organisations représentatives des professionnels de santé.

Cette enquête anonyme invite les soignants à répondre à une quarantaine de questions jusqu’au 23 avril 2023.

Des rencontres physiques et en ligne seront organisées chaque mois

« Nous voulons capitaliser en travaillant sur ce qui se fait, en s’appuyant sur ce qu’il se passe sur le terrain, en recensant ces initiatives » – Philippe Denormandie.

Ces travaux permettront d’établir un état des lieux sanitaire de la situation des professionnels de santé dans le but de partager les bonnes pratiques et d’améliorer l’accès à la médecine du travail.

Les docteur Philippe Denormandie, Marine Crest-Guilluy et Alexis Bataille-Hembert ont été désignés pour mener à bien ces travaux, qui seront réalisés en collaboration avec les soignants sur le terrain. Les futurs chantiers incluent les besoins de santé spécifiques, les risques professionnels, l’exposition aux maladies chroniques, la santé mentale et les addictions.

Les soignants peuvent écrire à l’adresse contact@santedessoignants.fr pour réfléchir ensemble aux besoins de santé spécifiques, aux risques professionnels, à l’exposition aux maladies chroniques, à la santé mentale et aux addictions.

Pour en savoir plus, cliquez sur ce lien.

DÉCRYPTAGE DES PARTENAIRES DE L’APPA


L’association APPA a été créée en 1980 par des médecins afin de combler les lacunes des statuts de leur confrères médecins et pharmaciens hospitaliers en termes de protection sociale.  


L’APPA qui est une association à but non lucratif a bâti des contrats de prévoyance et santé en s’appuyant sur des professionnels reconnus dans le monde de l’assurance.
Notamment Bessé son partenaire historique qui la conseille et qui l’accompagne.
Bessé travaille en étroite collaboration avec l’APPA et négocie ensuite avec les assureurs, afin de mettre en place des contrats sur mesure pour les adhérents de l’APPA.
Bessé assure également le suivi et la gestion des adhésions, des cotisations et des sinistres prévoyance tels que les arrêts de travail, l’invalidité et le décès. Elle se charge également des évolutions et modifications de contrat des adhérents de l’association.

Les solutions que Bessé conçoit avec l’APPA sont souscrites auprès d’un assureur reconnu, Generali leader européen de l’assurance de personnes et Europ-Assistance.

D’autres acteurs travaillent en étroite collaboration avec l’APPA afin d’offrir aux adhérents la protection sociale la plus complète et personnalisée possible.

Nous vous vous proposons de consulter le schéma ci-dessous afin de les découvrir.

Comme vous pouvez le constater, Mercer assure la gestion des frais de santé des adhérents APPA en proposant un certain nombre d’avantages, tels que la télétransmission directe des remboursements entre le centre de gestion et la Sécurité sociale. Ce qui permet aux adhérents APPA de bénéficier d’une gestion des frais de santé simplifiée et rapide. Les adhérents peuvent accéder à leur compte MERCER via leur espace connecté : https://espace-appa.besse.fr/.

Autre acteur non-représenté sur ce schéma : SantéClair qui est spécialisé dans la gestion du risque santé et travaille pour les organismes de complémentaires santé. Grâce à son vaste réseau de professionnels en optique, dentaire, audioprothèses et de médecines douces, SantéClair permet aux adhérents de l’APPA de bénéficier de solutions sur mesure qui répondent à des besoins spécifiques en matière de santé.

Vous souhaitez poser vos questions à un partenaire de l’APPA en particulier ?

En tant qu’adhérent vous bénéficiez d’un numéro dédié pour chaque partenaire de l’APPA :

  • Bessé – Gestionnaire Contrats APPA : 09 69 36 37 10
  • Mercer – Gestionnaire Santé APPA : 09 72 72 02 24 (fonctionne aussi pour le réseau de soins SantéClair)
  • Europ Assistance – Assistance APPA : 01 41 85 87 18 (en France métropolitaine) et 0 262 97 58 12 (pour les DROM)

L’ARRIVÉE DES NOUVEAUX INTERNES


En tant qu’adhérent vous êtes satisfait des contrats proposés par l’APPA ?


C’est donc important d’accompagner et d’informer vos internes sur les absences de prévoyance et de contrat santé à l’hôpital et de mettre en avant les contrats de l’APPA !

On constate en effet que les jeunes Internes ont tendance à se sentir invincibles. Quitte à en oublier de se prémunir face aux risques financiers liés à un arrêt de travail.

Or, il est important de rappeler qu’un Interne perd la totalité des revenus issus des gardes et astreintes, dès le 1er jour d’arrêt de travail.

Par ailleurs, et nous l’avons vu avec la crise sanitaire, nul n’est à l’abri d’un incident de la vie y compris les plus jeunes.

Plus que jamais, il est donc primordial de se prémunir face aux aléas de la vie personnelle mais également professionnelle. À savoir risques psychosociaux, burn-out, etc….

Conscient de leur besoin en termes de protection sociale, l’APPA, avec l’aide de son courtier Bessé a négocié des cotisations adaptées à leur budget, défiant toute concurrence !

Ainsi en souscrivant au contrat APPA, les Internes de 1ère et 2ème année peuvent bénéficier d’une prévoyance à partir d’1,50€/mois (cotisation à l’association incluse).

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Interview de Pierre-François Godet – Trésorier du Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux


« Il faut remettre l’équité, la solidarité et les valeurs
du service public au cœur du management à l’hôpital »

A l’origine, l’APPA est une émanation du Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux (SPH) avec lequel elle continue d’entretenir une relation partenariale privilégiée. Rencontre avec le Dr. Pierre-François Godet, psychiatre à l’hôpital du Vinatier (Bron, 69) et trésorier du syndicat, qui cumule plus de 30 ans d’engagement et une langue hors de la poche, surtout lorsqu’il s’agit de défendre le service public de la discipline…

Qu’est-ce que le SPH ?

C’est le principal syndicat représentant les psychiatres de service public. Il a été fondé en 1945, la même année que la revue scientifique, L’information psychiatrique. Il regroupe aujourd’hui environ 20 % des psychiatres hospitaliers ou assimilés, ce qui a beaucoup changé depuis plusieurs décennies. Pendant longtemps, les psychiatres hospitaliers étaient nommés par une commission paritaire, composée notamment de praticiens élus, à travers les syndicats. La plupart des psychiatres étaient alors syndiqués car il était préférable d’être soutenu pour obtenir un poste. Puis le système de nomination a changé, désormais sous la responsabilité du Ministère de la Santé. Cela a eu un impact évident sur les adhésions mais aussi sur la mission des différents syndicats, comme le nôtre, désormais essentiellement axée sur la défense des intérêts catégoriels et de la discipline dans son ensemble.

Quelles sont ces missions justement ?

De façon générale, en tant que syndicat, on défend la profession et notre mode d’exercice, dans un contexte globalement très hostile puisque la médecine publique est de plus en plus délaissée. C’est particulièrement vrai pour la psychiatrie, qui reste une discipline « humaine », par définition onéreuse, avec laquelle la logique d’économies et de rationalisation n’est pas compatible : pour vous donner une idée, 85 % des charges d’un hôpital psychiatrique vient en moyenne des dépenses de personnel, contre 70 % dans un hôpital général ! On milite justement, vu le nombre de postes vacants, pour l’augmentation des salaires, car c’est le seul moyen de redevenir attractif. On ne va pas se mentir : les praticiens font partie des catégories privilégiées par rapport à la population générale, mais on ne peut pas non plus nier que nous évoluons dans une économie de marché, un système concurrentiel, où les collègues sont mieux payés et ont moins de pénibilité dans le privé, que ce soit en clinique ou en cabinet…

Quelles actions menez-vous auprès de vos adhérents ?

On intervient sur plusieurs champs. D’abord, un travail d’information en direction des collègues qui ne sont généralement pas très bien informés sur leurs statuts, et donc sur leurs droits. C’est le cas de la retraite, actuellement. Il faut produire et diffuser cette information, ce qui est très chronophage et occupe une bonne partie du temps alloué au syndicat. Ensuite, on a un rôle d’intervention ponctuelle lorsqu’on est sollicité pour défendre un adhérent, sur une problématique statutaire, ou l’exercice de la discipline, dans son ensemble, lorsqu’il s’agit par exemple de contester un texte par voie judiciaire. Enfin, on a une mission d’écoute et d’étude de la situation des psychiatres de service public, notamment à travers des sondages. On en a produit une, récemment, sur le sujet de l’isolement et de la contention. Et une autre, qui vient de se terminer, sur la pénibilité et l’attractivité de la profession.

Pouvez-vous nous en dire plus ?

Pas encore, car il y a maintenant un gros travail d’analyse, qui va sûrement prendre du temps, mais je peux vous parler de la démarche… On a lancé cette enquête en ligne, durant 1 mois, auprès de tous les psychiatres d’exercice public de notre base de contacts. L’objectif était de les interroger sur leur situation professionnelle, à travers des critères objectifs (sexe, âge, environnement, activité principale, nature de l’établissement, etc.) et d’autres sujets de l’ordre du ressenti. On leur a par exemple demandé d’exprimer leurs motifs de plaisir dans le travail ou leurs principales sources de reconnaissance. Au total, il y avait une cinquantaine de questions. On a reçu près de 1 200 réponses, ce qui est beaucoup et intéressant puisqu’une majeure partie vient de praticiens non-adhérents, permettant d’avoir une vision assez large au-delà du seul syndicat.

Est-ce que la psychiatrie est une spécialité particulièrement exposée aux risques psychosociaux ?

Oui et non. D’un côté, c’est une discipline qui reste très axée sur l’humain et la relation, donc je dirais que nous sommes encore un peu épargnés. Par contre, il y a aussi des risques, au sens propre, en particulier dans la psychiatrie de secteur avec les soins sans consentement. Comme on a des patients qui ne sont souvent pas conscients de leur maladie et qui évoluent, à l’image de la société, vers une forme d’intolérance croissante à la frustration, les psychiatres sont globalement plus exposés à leur vindicte ou à celles de leurs proches. C’est usant et c’est un facteur de risques particulier que l’on retrouve également dans d’autres spécialités, comme les urgentistes. C’est valable aussi pour le suivi. Quand quelqu’un a une rechute de son cancer, il en veut à son cancer ou à ses habitudes de vie, mais pas à son cancérologue. Mais quand quelqu’un présente une rechute sévère de sa psychose, il ne croit pas plus à son psychiatre qu’à sa psychose…

Et quel est votre regard syndical, plus général, sur ces risques à l’hôpital ?

De façon plus générale, concernant la médecine publique, je pense que l’hôpital est vraiment malade dans son mode de management. Il y a vraiment des problématiques structurelles que l’on retrouve, dès les études de médecine, à travers une logique d’écrasement et de souffrance, comme si c’était la clé de la réussite au détriment de l’esprit d’équité, de solidarité, de… service public ! J’ai souvent coutume de dire qu’on a tendance à prendre le pire de la culture latine (la logique de gladiateur, combattre et souffrir) mais aussi le pire de la culture anglo-saxonne, avec une logique économique et néo-libérale complètement inadaptée au fonctionnement d’un service public hospitalier. Ça créé de la souffrance et de l’incompréhension. L’enjeu du management est fondamental, mais il faut y consacrer beaucoup de temps et être très lisible auprès des personnes concernées. En tant que chef de pôle, par exemple,  j’essaye de préserver de l’équité. Par exemple, dans le pôle, nous avons mis en place une « grille de pénibilité », connue de tous, liée aux matinées de permanence médicale les samedis dimanches et jours fériés.. Quand quelqu’un va travailler un dimanche de week-end prolongé, on va compter 3 points ; ce sera 1 point pour un samedi « ordinaire », etc. Chacun a accès à un tableur où il peut voir toutes ces informations et faire des simulations sur sa propre pénibilité. L’idée, c’est de réintroduire de l’équité, de la transparence, des outils de partage et d’échanges. Il faut s’en donner les moyens, car cela prend du temps. C’est toujours perfectible mais je préfère largement cette démarche à d’autres logiques, basées sur celui qui parle le plus fort ou celui qui est le plus ancien…

Le fait qu’on parle beaucoup de santé mentale a-t-il un impact sur la discipline ?

La santé mentale, c’est très à la mode. Mais ce n’est pas la psychiatrie et il y a une sorte de confusion entretenue à destination de l’opinion, qui ne contribue pas à s’attaquer, selon moi, aux vrais problèmes structurels. Prenez les réseaux sociaux, par exemple. C’est un vrai sujet de santé mentale, car ils peuvent être source de souffrance, diminuer le niveau cognitif, le lien social, etc. Cela concerne tout le monde, mais quand quelqu’un va révéler des troubles autistiques, des phénomènes de harcèlement ou décompenser des symptômes après en ligne, on entre cette fois dans le registre de la psychiatrie.

Délivrer des messages de prévention des risques induits par les réseaux sociaux, c’est très bien, mais ça ne coûte rien à côté des moyens humains qu’il faut pour prendre en charge ceux qui ont échappé à la prévention !

Le souci avec cette confusion, c’est qu’une problématique liée à l’exercice de la psychiatrie va être abordée sous l’angle de la santé mentale, pour donner à croire que le sujet est traité, alors que les besoins, les moyens nécessaires et les situations sont complètement différents. Il y a beaucoup d’acteurs qui font des choses très bien pour la visibilité et l’accompagnement de la santé mentale. Quand une personnalité politique va visiter ou soutenir une démarche en la matière, plutôt qu’une unité psychiatrique, c’est très positif, mais il ne faut pas croire ni laisser croire que cela va résoudre nos problèmes de fond et nos manques de moyens.  Annoncer au JT de 20 heures 200 000 euros de subvention pour une association ou une campagne de prévention, ça impressionne, ça rassure, mais ça suffit à peine à payer le salaire et les charges d’un(e) psychiatre, d’un(e) psychologue et d’un(e) infirmier(ère) pour une année. 12 millions de nos concitoyens souffrent d’un trouble mental, dont plus de 2 millions d’une forme sévère (trouble bipolaire, schizophrénie, dépression résistante).

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