Interview de Marion Giry et Valentin de la Noue, membres de l’association ANJMIR


« La Médecine Intensive et Réanimation a vraiment pris un tournant, depuis plusieurs années, sur les questions de qualité de vie au travail car nous savons tous qu’un médecin malheureux est un médecin qui soigne mal… »

L’APPA soutient l’Association Nationale des Jeunes Médecins Intensivistes Réanimateurs (ANJMIR) qui représente les internes et jeunes praticiens de la spécialité et se mobilise également sur le sujet de la qualité de vie au travail. Échanges avec Marion Giry et Valentin Villiers de la Noue, Présidente et Secrétaire général de l’association.


Qu’est-ce que l’ANJMIR ?

Marion

L’ANJMIR a été créée en 2017 lorsque le nouveau DES (Diplôme d’Études Spécialisées) de Médecine Intensive – Réanimation (MIR) a été mis en œuvre. L’objectif était de réunir tous les nouveaux internes de cette spécialité, dans un cadre associatif, pour les représenter et les accompagner dans leur future carrière. Je faisais moi-même partie de la première promotion du diplôme et je suis engagée dans l’association depuis 4 ans. Tous les internes de la spécialité font partie de l’ANJMIR, ce qui représente environ 500 adhérents. Et un peu plus d’un millier avec les jeunes médecins…

Quelles sont ses missions ?

Valentin

Le premier objectif est d’informer les futurs internes sur la spécialité, notamment sur son mode d’exercice et les différents débouchés qu’elle permet. Ensuite, on a une mission d’intégration des nouveaux internes, lorsqu’ils ont fait leur choix, par exemple à travers des journées d’accueil ou des webinaires organisées en lien avec les sociétés savantes. La MIR est une discipline où il y a beaucoup de recherche et de nouvelles connaissances, donc notre rôle est d’encourager la formation et la pédagogie, de façon individuelle ou collective. L’ANJMIR intervient également pour favoriser la qualité de vie des internes et des médecins, au travail et en dehors, sachant que nous sommes dans une spécialité intensive, qui ne s’arrête jamais, sujette aux risques psychosociaux. Notre mission est ainsi de veiller aux bonnes conditions de travail, à la prise en compte des problèmes et à tout ce qui permet de garantir le travail en équipe, inhérent à la discipline. Nous avons enfin un pôle communication pour faire connaître la médecine intensive-réanimation auprès du grand public ainsi que pour créer du lien au sein de la spécialité. En ce moment, par exemple, nous préparons des informations sur les grandes avancées en recherche médicale induites par la spécialité.

La médecine intensive – réanimation a été très exposée durant la crise sanitaire… Quels en sont les impacts pour les internes et jeunes médecins que vous représentez ?

Marion

Le COVID a été effectivement une période où les réanimateurs ont été extrêmement sollicités. Nous n’avons pas encore le recul nécessaire, ni toutes les données, mais nous avons tous conscience qu’il y a eu une surcharge majeure de travail, avec un impact négatif sur les équipes médicales et paramédicales. Nous venons d’ailleurs de lancer une enquête pour interroger tous les internes de MIR de métropole et d’outre-mer sur leur qualité de vie au travail. L’objectif est d’évaluer la situation actuelle et de proposer des axes d’amélioration, à partir des résultats qui seront connus, analysés et publiés durant le premier semestre 2023.

Valentin

De façon générale, c’est un sujet qui nous tient beaucoup à cœur, à titre personnel et à l’échelle de l’ANJMIR. Quelle que soit leur spécialité, les internes sont très exposés aux risques de dépression, d’épuisement professionnel voire de suicide ; c’est une profession et un statut qui ont été très affectés par des drames à répétition et nous sommes tous très vigilants sur le sujet. En Médecine Intensive-Réanimation, nous avons aussi la chance de collaborer avec des sociétés savantes et un collège d’enseignants particulièrement mobilisés sur la question du temps de travail et des conditions d’exercice. La Médecine Intensive et Réanimation a vraiment pris un tournant, depuis plusieurs années, sur les questions de qualité de vie au travail car nous savons tous qu’un médecin malheureux est un médecin qui soigne mal…

Est-ce que vous collaborez sur ce sujet, comme sur d’autres, avec d’autres associations d’internes ?

Valentin

Oui, bien-sûr. Nous organisons par exemple des webinaires avec des associations d’autres spécialités lorsque certains sujets se recoupent. C’est le cas, par exemple, de la gériatrie. On a souvent entendu que les personnes âgées ne pouvaient pas aller en réanimation, ce qui n’est pas toujours vrai et cela nous a conduit à organiser un module d’information en commun. Nous partageons également des outils avec d’autres spécialités, comme les néphrologues ou les dermatologues, et entretenons aussi des liens avec les différents syndicats d’internes, à l’échelle locale et nationale.

Marion

Concernant notre enquête sur la qualité de vie au travail, nous avons souhaité la « limiter » à notre spécialité, afin d’avoir un aperçu réel et précis de la situation, en prenant en compte nos spécificités, comme le fait d’être une discipline « à gardes ». Une fois les résultats connus, les prochaines étapes consisteront peut-être à l’élargir et à discuter avec d’autres entités pour communiquer dessus et réfléchir à des moyens d’action collectifs.

Qu’est-ce que vous apporte le partenariat avec l’APPA ?

Marion

Au-delà du soutien financier, qui est important pour une structure comme la nôtre, nous sommes très heureux de collaborer avec l’APPA car nous partageons les mêmes valeurs. C’est une association qui se met entièrement au service de ses adhérents, tout en se mobilisant sur le sujet des risques psycho-sociaux et de la santé mentale des praticiens hospitaliers. C’est toujours enrichissant et valorisant d’avoir des partenaires qui sont sur la même longueur d’onde, car cela permet à la fois de travailler ensemble, de façon constructive et de s’entraider, au service de nos adhérents respectifs.

Quels sont les grands projets de l’ANJMIR pour 2023 ?

Marion

L’objectif, c’est de continuer à se développer et s’améliorer dans toutes nos missions. L’enquête en cours va être très importante pour identifier et trouver des solutions d’amélioration à la qualité de vie des internes dans notre discipline. Nous cherchons également à mieux faire connaître la spécialité auprès des externes mais aussi vers le grand public. Nous avons par exemple produit une série de vidéos, qui permettent d’expliquer concrètement le rôle d’un médecin de MIR et les différentes carrières possibles. La première a été diffusée début novembre et 9 autres vont suivre, tout au long de l’année…

Pour en savoir plus : anjmir.fr