Tension, désinsertion ou autres situations critiques au sein des personnels hospitaliers : comment les détecter et les prendre en charge ?


Suite à notre lettre de l’APPA n° 83, les administrateurs de votre association ont souhaité vous rappeler quelques notions et conseils sur deux syndromes qui pourraient survenir dans le cadre de votre exercice : le burnout et le bore-out.


Le « burnout », ou syndrome d’épuisement au travail, encore très controversé aujourd’hui, concerne largement les professionnels de santé et notamment les praticiens.

Ce dernier peut se sentir mésestimé, insatisfait professionnellement, dépressif, voir même suicidaire.

Parallèlement, le « bore-out », ou l’ennui au travail, demeure tabou.

Occuper un poste où il n’y a rien à faire peut devenir un supplice. Avec l’oisiveté au travail se cache un total manque de stimulation intellectuelle.

On peut définir le burn-out comme un état d’épuisement cognitif (perte de motivations, difficultés de concentration) et physique. La personne concernée peut présenter des symptômes de détresse et de stress en milieu professionnel.

Mais on relève également de fréquentes manifestations affectant le système cardiovasculaire (risque coronarien), la fonction sommeil, l’appareil musculo-squelettique (douleurs chroniques), la sphère affective (humeur dépressive, mauvaise estime de soi, anhédonie), les relations interpersonnelles (détachement, indifférence, irritabilité)…

Le burn-out peut être considéré comme une souffrance qui peut dépasser le cadre psychique.

Face à l’ennui, des comportements palliatifs peuvent apparaître : grignotage, pauses cigarettes plus fréquentes, recours à l’alcool. Mais ces addictions se retrouvent également dans le bore-out avec la consommation de drogues de plus en plus « dures ».

Ainsi, le burn-out a fait l’objet de nombreuses études (cf. article de la lettre 83 de l’APPA) contrairement au bore-out.

On retrouve parallèlement aux troubles physiologiques et psychiques de nombreux comportements à risque. Le sentiment d’épuisement professionnel altère la relation médecin/patient et la concentration au travail. Il peut donc être considéré comme facteur de risque d’erreurs professionnelles.

Actuellement, il n’y a aucune prévention spécifique du burn-out dans le milieu de la santé.

Les médecins ont du mal à consulter un confrère pour des raisons psychologiques ou psychiatriques. De plus, la médecine du travail n’existe peu ou pas pour les praticiens hospitaliers. Il y a une sorte d’ »omerta » sur le sujet, la peur d’être jugé incompétent, la culpabilité d’avoir failli à ses idéaux de service au public. Tout ceci aggravant la symptomatologie et retardant la prise en charge.

Le test de Maslach (Maslach Burnout Inventory ou MBI) permet d’évaluer le niveau d’épuisement émotionnel, de dépersonnalisation, et d’accomplissement personnel. Cependant, il n’est pas validé dans toutes les situations.


Des solutions existent mais il convient de définir au préalable la nature et les limites de la responsabilité médicale. Le lien entre les praticiens et la médecine du travail, avec un abord spécifique, peut alors être une aide et un support psychologique adaptés.

Plusieurs dimensions doivent être explorées :

1. Rechercher des solutions curatives et élaborer une prévention,

2. Considérer le « traitement » du burn-out, à la fois sous l’angle de l’individu et du groupe social (l’équipe soignante, le service, la structure hospitalière dans son ensemble),

3. Admettre que les réponses au burn-out rejoignent, recouvrent et dépassent la problématique de réponse au stress professionnel en général,

4. Voir que le burn-out des soignants comme unique conséquence d’un problème institutionnel et organisationnel est une analyse restrictive.

L’approche organisationnelle du burn-out passe par un certain nombre de remises en question du groupe professionnel. Il faut se questionner sur le manque de soutien, l’ambiguïté des rôles dans le travail, la charge de travail excessive et la désorganisation du travail.

L’approche individuelle est représentée par l’analyse de la relation d’aide, la notion de capacité de résistance au stress et l’analyse de la « bonne distance ».

Enfin une approche éthique est indispensable. La souffrance des soignants se situe à l’interface de nombreux champs de réflexion médicaux, psychologiques, éthiques, sociaux et ergonomiques. Des changements organisationnels mal pensés mettent en péril la qualité des soins et de vie au travail.

On doit donc instituer respectivement :

  • La reconnaissance et la valorisation du travail accompli par une sensibilisation et une action des coordonnateurs et des chefs de service vis-à-vis des internes,
  • La reconnaissance comme maladie professionnelle, même si les enjeux financiers sont importants,
  • L’octroi de temps de repos obligatoires,
  • La réduction de la charge de travail administrative (qui fait perdre souvent le sens de la pratique),
  • La diminution de la pression de la rentabilité et du pouvoir des directions.

La prévention est ainsi essentielle.

Il faut donc œuvrer en prévoyant des entretiens pour les internes avec les chefs de services ou les coordonnateurs qui, selon les enquêtes diverses, semblent bien souvent loin de ces problématiques (rapport IGAS sur l’HEGP, enquête SPS, enquête des internes).

Il faut également respecter les repos de sécurité après la garde (Arrêté du 14 septembre 2001 – JORF n°217 19/09/2001), revaloriser la responsabilité des praticiens ainsi que la reconnaissance de leur travail, par leurs collègues du corps médical mais aussi par l’administration, et réinstaurer des instants de communication.

Pour rappel, les actions sont limitées à certains groupes professionnels et institués par eux :